Le soutien scientifique apporté par la HEFSM a contribué aux médailles olympiques de cyclisme
Durant la première semaine des Jeux olympiques, les cyclistes suisses ont remporté pas moins de cinq médailles: quatre en VTT (l'or pour Jolanda Neff, l'argent pour Sina Frei et le bronze pour Linda Indergand ainsi que l'argent pour Mathias Flückiger) et une en cyclisme sur route (l'argent pour Marlen Reusser dans le contre-la-montre individuel). Nous nous sommes entretenus par téléphone avec Nina Zenger et Beat Müller, collaborateurs de l'OFSPO, et leur avons demandé de quelle manière «Macolin», la HEFSM et l'OFSPO avaient contribué à la préparation des athlètes de Swiss Cycling.
29.07.2021 | Kurt Henauer, Communication OFSPO
Le parcours de VTT à Tokyo était très particulier. Vous l’aviez notamment modélisé en 3D, n’est-ce pas?
Beat Müller (collaborateur scientifique du groupe physiologie du sport Endurance de la HEFSM et chef du sport de performance à Swiss Cycling): Oui, ce parcours était particulier car il avait été créé artificiellement. Avec de nombreux changements de direction et plusieurs côtes assez courtes et raides suivies de descentes techniques, il ne ressemblait à aucun autre tracé de coupe du monde. Après avoir analysé le parcours, nous avons mis en place un entraînement intermittent spécial comprenant 3 séries de 14 répétitions de 30 secondes de charge et de 15 secondes de récupération.
Lors des tests de performance réalisés en mai, tu as dit que Mathias Flückiger n'avait jamais été si fort. Pour quelles raisons?
Müller: Le développement de la performance de l'ancien champion du monde M-23 a été documenté sur plusieurs années dans le cadre du diagnostic de la performance. Cela lui a permis d'optimiser continuellement son entraînement et d'obtenir ses meilleurs résultats ce printemps. Mathias a aussi travaillé avec l'expert de l'entraînement de la force qu'est Adrian Rothenbühler (note de la rédaction: également entraîneur de Mujinga Kambundji et désigné entraîneur de l'année 2019). Technicien reconnu, «Math» a ainsi pu développer sa condition physique générale.
Comment avez-vous utilisé le laboratoire de chaleur situé à Granges et dirigé par votre collègue Thomas Steiner pour l’entraînement des cyclistes?
Nina Zenger (collaboratrice scientifique du groupe physiologie du sport Endurance à la HEFSM): Toutes les disciplines ont bénéficié d’un programme d’acclimatation à la chaleur et à l’humidité extrêmes de la région de Tokyo, élaboré en collaboration avec Swiss Cycling. Les cyclistes sur piste ont par exemple commencé par effectuer un camp d'entraînement à Majorque pour s'habituer à la chaleur. À leur retour et avant leur départ pour le Japon, les cinq athlètes ont effectué une «unité de maintien» sur un rouleau deux fois par semaine dans le laboratoire de chaleur, dans les conditions climatiques de Tokyo.
Comment cette période d’acclimatation s’est-elle passée avec Marlen Reusser et les trois médaillées de VTT Jolanda Neff, Sina Frei et Linda Indergand?
Müller: Cette préparation a également été initiée par la HEFSM et l'OFSPO. Ces quatre athlètes et Edi Telser, l'entraîneur national de Swiss Cycling, se sont rendus en camp d'entraînement au bord de la mer Méditerranée, à Alicante, pour s'habituer aux conditions climatiques sur place. Ce camp a également été mis à profit pour travailler à nouveau de manière ciblée sur la technique de conduite avec l'Espagnol Oscar Saiz. Il a ainsi été possible de combiner la préparation physique et technique avec l'acclimatation à la chaleur. Cette approche multiple a porté ses fruits, surtout si l'on tient compte des conditions extrêmes auxquelles les athlètes ont été confrontées à Tokyo.
Neff, Frei et Indergand faisaient partie du programme d'encouragement du sport par l'armée. De son côté, Marlen Reusser a été soutenue en collaboration avec Swiss Cycling. Comment cela s'est-il passé?
Müller: Ces dernières années, Marlen a déjà effectué, en guise de préparation à des grandes manifestations, plusieurs camps d'entraînement en altitude évalués par notre collègue Katja Kellenberger. Suite à ces expériences, il a été décidé de lui proposer une solution individuelle combinant entraînement en altitude et entraînement à la chaleur. Marlen a donc commencé sa préparation par un entraînement au col de la Bernina avant de se rendre à Alicante. Outre ces deux types d'entraînements, le timing a également joué un rôle important pour qu'elle puisse atteindre sa meilleure forme à Tokyo.
Zenger: Nous avons accompagné Marlen à Milan pour les essais en soufflerie car l'aérodynamique joue un grand rôle dans le contre-la-montre. La soufflerie présente l'avantage de pouvoir comparer différents scénarios en relativement peu de temps, comme la position de l'athlète, les casques, les roues ou la tenue. Et la soufflerie a encore un autre avantage par rapport aux tests d'aérodynamique réalisés au vélodrome…
C'est-à-dire?
Zenger: Dans la soufflerie, l'athlète est positionnée sur une plateforme pivotante, ce qui permet de modifier l'angle du vent. Disposer de données sur la performance du matériel face à différents angles de vent permet d'envisager plusieurs situations. Au final, le but est de réduire la résistance au vent et d'obtenir une vitesse plus élevée pour une puissance donnée.
Quels autres aspects avez-vous travaillé?
Zenger: Le parcours du contre-la-montre de Tokyo avait ceci de particulier qu'il commence par une descente. Cela peut engendrer un problème de rythme et peut s'avérer très coûteux sur le plan énergétique de rouler encore plus vite à une vitesse déjà élevée. Compte tenu du profil de la course, des connaissances sur la résistance au vent et des valeurs de performance dont nous disposions, nous avons élaboré une stratégie qui a permis à Marlen de se lancer à la course au chrono dans les meilleures conditions.
Müller: Marlen a parfaitement géré sa course. Contrairement à d'autres participantes, elle n'a pas dû tout donner dans les montées et la partie finale.
Merci pour ces précisions!
Interview: Kurt Henauer
Kurt Henauer
- Tél.
- 058 467 63 10